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Ségur de la santé : 33 propositions en faveur d’une nouvelle gouvernance de l’hôpital

Lancé à la fin du confinement, le Ségur de la santé devait tirer les premières leçons de la crise sanitaire et proposer des mesures concrètes pour réformer l’hôpital public. Sa feuille de route exigeait de répondre aux urgences nées de l’épidémie du Covid-19, tout en s’inscrivant dans la continuité du plan « Ma Santé 2022 ». De ces deux mois de concertations, ressortent 33 propositions concrètes qui répondent à trois grands objectifs : relancer l’investissement dans le secteur hospitalier, poursuivre la déconcentration du système de santé et simplifier sa gestion administrative.

Volets les plus attendus car sources de conflits récurrents avec le monde hospitalier, le financement et la gouvernance de l’hôpital public sont revus en profondeur. Les pôles d’activité pourraient devenir optionnels au profit des services hospitaliers qui retrouveraient ainsi plus de responsabilités et de marges de manoeuvre. Les missions des commissions médicales d’établissement (CME) pourraient être renforcées et des organisations alternatives seraient autorisées (exemple : fusion des CME et des commissions des soins). Sur la question du temps de travail, les établissements seraient autorisés à négocier des accords locaux (relèvement du plafond des heures supplémentaires, annualisation du temps de travail…). Quant à l’intérim médical, il devrait être mis fin au « mercenariat » actuel, avec le blocage des rémunérations dépassant les plafonds règlementaires. Toujours dans la perspective d’introduire plus de souplesse, il est proposé d’ouvrir ou de réouvrir 4 000 lits « à la demande » afin de pouvoir faire face rapidement à des pics d’activité, liés par exemple à une épidémie ou à l’afflux de patients étrangers.

Concernant la question du financement, le Ségur de la santé préconise d’expérimenter, pour les activités de médecine, un mode de financement mixte associant tarification à l’activité (T2A), dotation populationnelle et financement à la qualité. La dette hospitalière sera reprise à hauteur de 13 Md€ et 8,2 Md€ seront alloués aux revalorisations salariales (établissements de santé et médico-sociaux) ainsi qu’à l’embauche de 15 000 personnes.

Autre mesure phare : la création du Conseil national de l’investissement en santé, en remplacement du Copermo (Comité interministériel de la Performance et de la Modernisation de l’offre de soins hospitaliers). Les missions de cette nouvelle instance seront recentrées sur la répartition des enveloppes budgétaires entre régions et l’accompagnement des projets d’investissements de plus de 100 M€ ou reposant exclusivement sur des aides publiques. Ce recentrage s’accompagnera d’une déconcentration du pilotage des investissements hospitaliers, avec la constitution des conférences territoriales de l’investissement en santé. Ces nouvelles entités, auxquelles seront associés les élus locaux, traiteront des investissements ne répondant pas aux critères définis pour le comité national.

Poursuivre le décloisonnement ville-hôpital et améliorer la coordination des soins

Axe directeur de toutes les réformes engagées depuis la loi HPST de 2009, la coordination entre professionnels de santé figure dans les accords du Ségur de la santé. Un budget de 2,5 Md€ est alloué à ce décloisonnement, destiné à la création de maisons de santé pluriprofessionnelles et de centres de santé, aux équipes de soins primaires et aux CPTS ainsi qu’au déploiement du service d’accès aux soins (SAS).

L’amélioration de la coordination des soins passe aussi par le déploiement des Infirmières en pratique avancée (IPA), dont le nombre devrait être porté à 3 000 en 2022 et 5 000 en 2024. Et par la diversification des modes d’exercice, en donnant la possibilité aux médecins d’exercer aussi bien à l’hôpital qu’en médecine de ville, en particulier dans les zones sous-médicalisées.

Améliorer le suivi médical des personnes âgées

Dans la perspective du plan Grand âge et Autonomie, promis depuis l’année dernière et qui devrait ouvrir la voie à un 5e risque couvert par la Sécurité sociale, le Ségur de la santé propose que soit garantie dans tous les territoires une « offre médicale minimale ». Ce qui permettrait de pérenniser les astreintes de gériatres, déployer des équipes médicales mobiles et d’hospitalisation à domicile (HAD), développer la télésanté dans les Ehpad et structurer les modalités d’accès des personnes âgées dans les services hospitaliers. Au-delà de ces mesures, une enveloppe budgétaire de 2,1 Md€ devrait être allouée sur 5 ans aux établissements médico-sociaux. Un budget qui devrait leur permettre de financer des équipements (rails de transferts, capteurs de chute, fauteuils électriques…) et se conformer aux nouvelles règlementations (accessibilité, rénovation énergétique…).

1,4 milliard d’euros pour accélérer la transformation numérique

Définie pour 3 ans, cette enveloppe budgétaire doit permettre de concrétiser les décisions annoncées en 2019 dans la feuille de route « Accélérer le virage numérique en santé ». Le ministre de la Santé insiste notamment sur l’espace numérique auquel tous les Français devront avoir accès début 2022, projet ambitieux qui permettra d’accéder à son DMP, ses données administratives, celles relatives aux remboursements de ses dépenses ainsi qu’à ses données personnelles de santé collectées grâce à des appli mobiles ou des objets connectés. Le développement de la télésanté devrait en parallèle se poursuivre : recours encouragé à la téléconsultation (maintien de son remboursement à 100 % par l’Assurance maladie et modalités d’accès assouplies), télé-expertise élargie à tous les patients, prise en charge conventionnelle des actes de télémédecine pour les sages-femmes et les chirurgiens-dentistes, financement pérenne de la télésurveillance médicale.

Le gouvernement a annoncé la création d’un Comité chargé de suivre la mise en œuvre de ces propositions. Il est, par ailleurs, prévu l’ouverture de deux autres « Ségur » : le premier traitera des problématiques spécifiques des territoires ultramarins et le second sera dédié à la santé publique, autour de la santé des enfants et des adolescents, de la formation et de l’éducation à la santé.