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L’immigration qualifiée au secours de la croissance

Dans une note récente, le Conseil d’analyse économique (CAE), commission indépendante chargée de conseiller le Premier ministre, s’est penché sur l’immigration dans notre pays. Loin des discours politiques identitaires qui animent ce début de campagne présidentielle, l’étude revient sur le rôle positif qu’une immigration qualifiée joue sur la croissance économique, regrettant au passage que le France ne sache plus attirer les talents étrangers.

Une immigration peu qualifiée

En 2020, 37,8 % des immigrés avait un niveau scolaire au mieux égal au brevet des collèges, contre 18,9 % des natifs. Une situation que le CAE explique, principalement, par le fait que depuis les années 1990 le motif familial demeure le principal critère d’attribution d’un titre de séjour (91 % en 2019), loin devant le critère économique. Ainsi « sur la période 2007-2016, 43,7 % des immigrés en France sont venus au titre familial, contre 31 % pour leurs études, 10 % à titre humanitaire et seulement 9 % pour le travail », rappellent les auteurs de l’étude. Or, insiste le Conseil, « une immigration fondée sur le motif familial a tendance à renforcer la structure initiale de celle-ci ». En France, il en résulte que « 52 % des immigrés de 15 ans ou plus accueillis pour motif familial n’ont pas de diplôme ou un niveau équivalent au brevet des collèges ».

Une situation différente Outre-Atlantique

Le Conseil ne prône par une réduction de l’immigration, loin s’en faut. Il rappell, à ce propos, que « le flux annuel des immigrés permanents entrant en France tels que mesuré par l’OCDE était de 292 000 personnes en 2019, soit 0,41 % de sa population, ce qui est peu comparé aux autres pays de l’Union européenne et de l’OCDE (0,85 % en moyenne dans les deux cas) ». En termes d’incidence, les auteurs de l’étude insistent sur le fait que même peu qualifiée l’immigration joue un rôle positif en pourvoyant les emplois que les natifs ne souhaitent plus occuper.

Pour autant, le fait pour un pays d’accueillir un plus grand nombre d’immigrés diplômés lui permet de fortement stimuler sa capacité à créer des entreprises et à innover. Aux États-Unis, on note ainsi que 36 % des nouvelles entreprises comptent au moins un immigré parmi leurs fondateurs et ce chiffre grimpe à 44 % pour les entreprises technologiques de la Silicon Valley. « Au final, bien que les immigrés ne soient que 13 % dans la population américaine, ils représentent 26 % des entrepreneurs », précise le CAE.

Une dynamique que l’on retrouve également dans l’innovation : alors que seuls 10 % des brevets français sont déposés par une personne d’origine étrangère, plus de 20 % le sont aux États-Unis et au Canada. Selon des chercheurs américains cités dans l’étude, « une simple augmentation de 1 % du nombre de scientifiques et d’ingénieurs immigrés augmente de 9 à 18 % le nombre de brevets par tête déposé ».

L’adoption de nouveaux critères

Afin d’inciter davantage de diplômés à immigrer en France, le Conseil d’analyse économique recommande de simplifier les procédures de traitement des demandes de visas de travail émanant des entreprises. Il préconise également d’introduire en France un système « à points » d’analyses des demandes de titre de séjour qui serait basé sur plusieurs critères (études, expériences, compétences linguistiques, liens personnels et familiaux…). Le CAE préconise aussi un plus large accueil des jeunes diplômés, un développement de l’offre de formations supérieures dispensées en anglais afin de séduire davantage d’étudiants non francophones et enfin, de délivrer un plus grand nombre de titre de séjours aux étudiants en fin de cycle afin de favoriser leur implantation en France.

  • © 2021 Les Echos Publishing - Frédéric Dempuré
  • Nov 16, 2021